Ce journal est écrit au soir de la nomination aux fonctions de Premier Ministre de Monsieur Edouard PHILIPPE. Peu connu du grand public, souvent peu connu du monde médical, la nomination d’Edouard PHILIPPE est saluée par les médecins de sa région. Tous décrivent notre Premier Ministre comme un homme « attentif à la vie de ses concitoyens, doté d’un vrai sens de l’intérêt général, efficace et discret. » Les attentes des médecins sont grandes et à hauteur des déceptions multiples que nous avons vécues au cours des cinq dernières années. Nous avons été meurtris par certains aspects de la loi de modernisation de la Santé et malmenés par une convention de fracture opposant les différents modes d’exercice et ne répondant pas aux enjeux de la santé. En ce qui concerne notre spécialité, l’hépato-gastroentérologie, les attentes sont, là aussi, nombreuses. Comme nombre de spécialités médicotechniques, le mécontentement est fort devant des actes dont la valeur est bloquée depuis tant d’années. Le mécontentement est fort, également, dans la hiérarchisation des actes de consultation aussi complexe qu’inachevée rendant l’application de la convention bien difficile en pratique. Deux sujets sont également au cœur de nos préoccupations :
-Celui de la réforme du 3ème cycle des études médicales où le sort qui est réservé aux futurs internes d’hépato-gastroentérologie n’est pas à la hauteur des enjeux et de la qualité des soins qu’une grande démocratie doit proposer à ses concitoyens. C’est d’abord le sujet du temps de formation qui est en totale inadéquation avec les recommandations européennes, la demande des internes et celle de leurs enseignants. Mais c’est aussi la possibilité que s’offre la chirurgie digestive de vouloir s’emparer de l’endoscopie sans aucune justification ni difficulté d’accès aux soins. On rappellera ici l’article publié par LEYDEN J.E et al. dans Endoscopy en 2011 comparant les performances de la coloscopie pratiquée par des gastroentérologues et des chirurgiens. Il en ressort très nettement que sur les deux critères de qualité que sont l’incubation caecale et les taux de détection de polypes et d’adénomes, on note une différence significative en faveur des gastroentérologues. Ainsi, le taux d’incubation caecale est dans cette étude de 89%, 93% pour les gastroentérologues et 84% pour les chirurgiens (p < 0.0001). Le taux de détection de polypes y était de 19%, 21% pour les gastroentérologues et 14% pour les chirurgiens, différence également significative. Le taux de détection d’adénomes était dans cette étude de 12%, 14% pour les gastroentérologues et 9% pour les chirurgiens, différence qui n’était pas significative.
–Le dépistage du cancer colorectal. Il est grand temps, sur ce plan, que les pouvoirs publics puissent mettre tout en œuvre pour que les populations à risque élevé soient correctement informées de la nécessité de passer des coloscopies de dépistage et que les populations à risque moyen soient plus incitées à pratiquer les tests immunologiques de dépistage de sang dans les selles par une relance postale. Cette relance postale avec test a montré un gain de plus de 10 points du taux de participation. Il s’agit d’un enjeu de santé publique et de prévention. Le Président de la République Emmanuel MACRON a récemment rappelé tout l’intérêt qu’il y aurait à développer une politique de dépistage et de prévention efficiente.
Les premiers pas de notre futur Ministre de la Santé seront déterminants. L’attente de tous les professionnels de santé libéraux et salariés est grande après des années vécues douloureusement. La gastroentérologie se doit d’être l’interlocuteur privilégié sur un certain nombre de sujets et, en particulier, sur celui de la prévention du cancer colorectal et de la formation des futurs médecins.
Dr. Franck DEVULDER
Président
Réf. LEYDEN J.E et al. Endoscopy 2011 ; 43 :935-940